Cet article analyse les différences entre l’aquarelle et la gouache en tant que médiums picturaux, leurs points communs et leurs avantages, ce qui les distingue, ainsi que les situations où il est préférable d’utiliser l’aquarelle et celles où la gouache est plus appropriée.

En tant que médium pictural, l’aquarelle s’est pleinement affirmée au cours des dernières décennies. Elle n’est plus utilisée principalement pour des esquisses préparatoires de grandes compositions d’atelier, mais est désormais reconnue comme un médium sérieux pour des œuvres achevées. Dans le même temps, son matériau le plus proche, la gouache, reste largement sous-estimé aussi bien par les artistes que par les connaisseurs de peinture. Ces dernières années, une nouvelle tendance est apparue : la gouache est devenue plus populaire, tant en ce qui concerne les artistes qui en font leur médium principal que par le nombre croissant de livres et de cours consacrés aux propriétés spécifiques de ce matériau.
Quelle est la différence entre l’aquarelle et la gouache ?
Lorsqu’on parle de ces deux médiums, il est important de garder à l’esprit leur principale similitude et leur principale différence. Ils se ressemblent en ce qu’ils sont solubles dans l’eau, mais ils se distinguent par leur transparence. Nous examinerons d’autres ressemblances et différences spécifiques, mais c’est le point essentiel à comprendre.
La gouache se distingue de l’aquarelle par son opacité : le liant de la peinture est la même gomme arabique que celle utilisée pour l’aquarelle, mais la charge en pigment y est généralement plus élevée, ce qui renforce encore son opacité. C’est pourquoi la gouache est opaque, dense et couvrante.

L’aquarelle, en tant que médium, est plus complexe sur le plan technique en raison de la transparence de la peinture : les couches se superposent et restent visibles les unes à travers les autres, de sorte que la couche précédente apparaît toujours. Ainsi, l’aquarelle pardonne moins les erreurs que la gouache, qui permet d’ajouter davantage de couches en cas d’échecs ou de maladresses.

La gouache est le médium préféré de nombreux illustrateurs. Parmi les avantages évidents de la gouache, on peut citer le fait qu’il s’agit d’un matériau très pratique et compact : elle n’a pas d’odeur, ne nécessite aucun solvant supplémentaire, et les taches de peinture peuvent facilement être nettoyées à l’eau. Le seul véritable inconvénient est que l’on consomme généralement plus de peinture avec la gouache qu’avec l’aquarelle, car l’aquarelle est souvent fortement diluée à l’eau pour créer des lavis, tandis que la gouache est le plus souvent appliquée de manière plus épaisse et moins diluée, ce qui entraîne une consommation de peinture plus importante.

Même l’approche picturale en gouache et en aquarelle est différente : quelqu’un a très justement résumé cela en disant que les médiums opaques (huile, acrylique, gouache) relèvent d’une expérience de recherche directe sur la toile, tandis que l’aquarelle est un exercice de concentration. En aquarelle, il est nécessaire de réfléchir au processus et à la technique avant de poser la couleur, alors qu’en gouache on dispose de suffisamment de temps pour prendre des décisions au fur et à mesure de la peinture.
La succession des couches de peinture est également différente selon ces deux médiums : en aquarelle, le blanc correspond traditionnellement aux réserves de papier laissées vierges. De ce point de vue, la gouache est plus pratique : alors que la séquence classique des couches en aquarelle est, pour des raisons évidentes, « du clair vers le foncé », la gouache permet de travailler dans les deux sens. On peut poser d’abord les couleurs claires puis les foncées, ou au contraire commencer par les tons foncés et ajouter ensuite des tons clairs par-dessus.

La gouache est plus polyvalente, elle permet de réaliser des coups de pinceau plus texturés. Certains pourront objecter qu’en utilisant l’aquarelle très épaisse, on peut aussi obtenir des traces pâteuses. Mais si l’on applique l’aquarelle trop épaisse (directement sortie du tube), elle sèche en une couche brillante et épaisse qui se voit nettement sur le papier. La gouache, au contraire, permet de poser ces touches denses tout en séchant sans cet aspect brillant. Cependant, en travaillant à la gouache, il faut garder à l’esprit qu’une couche de peinture trop épaisse risque de se fissurer avec le temps.
En gouache, il est difficile d’obtenir des dégradés uniformes et des lavis aussi fluides et subtils qu’en aquarelle, et de manière générale la peinture est un peu moins « plastique ». Il est possible de fondre les couches avec de l’eau ou de les estomper à l’eau claire, mais cela demande davantage de précision et de délicatesse. Un autre facteur important à prendre en compte est que la gouache, lorsqu’on applique une nouvelle couche, a tendance à « accrocher » et réactiver la couche inférieure, même sur du papier coton, contrairement à l’aquarelle qui, sur un papier adapté, permet de superposer les couches sans troubler la précédente.

La gouache est moins exigeante à tous les niveaux, y compris en ce qui concerne les matériaux annexes. En aquarelle, la qualité du papier et des pinceaux joue un rôle essentiel. Mais si le papier pour aquarelle reste le support idéal pour peindre à la gouache, on peut en réalité utiliser presque n’importe quel papier, tant qu’il ne se déforme pas sous l’effet de l’eau.
Peindre à l’aquarelle nécessite des pinceaux relativement souples et faciles à contrôler, avec des pointes bien nettes, ce qui est crucial pour ce médium. Pour la gouache, ce type de pinceau est souhaitable, mais pas indispensable. En revanche, un point commun aux deux techniques est l’importance de la qualité des couleurs elles‑mêmes : une gouache d’étude se distingue autant d’une gouache de qualité « designer » ou professionnelle qu’une aquarelle d’étude se distingue des aquarelles destinées aux artistes.

La gouache peut être appliquée en couche dense et uniforme, de manière à ne laisser pratiquement aucune trace de pinceau. Cela est également possible en aquarelle, mais demande beaucoup plus d’eau.
La gouache sèche plus rapidement que l’aquarelle et a moins tendance à changer de tonalité ou à paraître plus pâle une fois sèche, comme c’est souvent le cas pour les couleurs aquarelles. De manière générale, avec la gouache, on observe qu’en séchant les tons foncés deviennent plus clairs, tandis que les tons clairs ont tendance à s’assombrir.
En résumé, ces deux médiums sont tous deux liés à la gomme arabique et donc re-solubles à l’eau, mais la transparence de l’aquarelle et l’opacité de la gouache exigent des techniques de peinture différentes, présentent chacune leurs propres avantages et offrent un rendu final distinct.

L’aquarelle demande davantage de planification, car il est impossible de revenir en arrière et de corriger véritablement les erreurs. Elle exige plus de concentration et un contrôle précis de l’eau, même si cela ne signifie pas qu’elle doit toujours être « rigide » : on peut peindre de manière libre et spontanée, en acceptant le mouvement de l’eau comme partie intégrante du processus.
L’aquarelle possède aussi une magie particulière, très difficile à exprimer avec des mots. Elle vient de ce flux de couleur jamais tout à fait maîtrisé, du fait que l’on n’a qu’une seule chance de réussir une touche, de cette pellicule légère de peinture qui semble faire corps avec le support, et bien sûr de la luminosité du papier blanc qui transparaît à travers le pigment transparent.
La gouache convient mieux à une peinture contemporaine, où l’on élabore les détails au fur et à mesure, avec moins de planification. Elle est également idéale pour remplir de grandes zones de couleur uniforme dans les illustrations ou les peintures abstraites. Elle est plus prévisible et plus facile à contrôler, et, dans ce sens, bien plus simple à utiliser.